Le Blog de Sacrebopol

Interview

Fweley Diangitukwa : " Les fraudes électorales "

Politologue, essayiste Congolais vivant en Suisse, Fweley Diangitukwa est un écrivain prolifique. A son actif plus d'une dizaines d'ouvrages publiés sur la République Démocratique du Congo. C'est à coeur ouvert qu'il a répondu à nos questions. Nous avons volontairement garder le style oral, explicatif et parfois répétitif pour que l'interview soit accessible à tout le monde. Du point de vue scientifique le professeur Fweley Diangitukwa n'a rien à prouver ses écrits et sa biographie parlent par eux-mêmes. Docteur en sciences économiques et sociales, mention science politique, il a enseigné au département de science politique de l'Université de Genève et à Schiller International University à Leysin en Suisse. Fraudes électorales : comment on récolonise la RDC est son dernier ouvrage qui vient d'être publié à l'Harmattan.

Le mardi 22 janvier 2008

Fwely DIANGITUKWA, chez lui à Saint-légier en Suisse - 31.6 ko
Fwely DIANGITUKWA, chez lui à Saint-légier en Suisse

Réveil FM : Monsieur Fweley Dia, pensez-vous que les élections en Afrique sont caractérisées par la banalisation de la fraude électorale et l'impunité des fraudeurs ?

Fweley DIANGITUKWA : Oui, je le pense. Mais partout sur le Continent où les élections ont été organisées, le peuple et leurs leaders ont pris chaque étape au sérieux. Quant à nous, en République Démocratique du Congo, seules quelques voix ont crié dans le désert, entre autres celle du professeur Augustin Mampuya et celle de M. Jérome Bonso de la Ligue nationale pour les élections libres et transparentes (LINELIT). Certains Congolais ont effectivement dit ouvertement que les élections seront truquées mais ils ne sont pas allés très loin après la proclamation des résultats. Beaucoup se sont tus depuis lors. Constater et prévenir sont une bonne chose, mais l'action est au dessus de tout. Lorsque nous nous sommes rendu compte collectivement que les fraudes massives ont eu lieu, il était de notre devoir de protester. Nous ne l'avons pas fait et nous nous sommes laissés dominés, terrorisés par le pouvoir qui a fini par avoir raison sur le peuple. Vous savez, les pays étrangers prennent les Congolais pour des naïfs, des gens peureux et complaisants. Oui, tout a été banalisé tout au long du processus électoral. Dans mon livre, je décris les stratégies mises en place par le pouvoir pour truquer les élections alors que nous avons eu des exemples des peuples qui ont résisté contre l'arrogance du pouvoir : le peuple ukrainien en constitue un .

Aujourd'hui, nous observons des résistances populaires au Kenya, en Géorgie et ailleurs. Qu'avons- nous fait en tant que peuple pour résister contre les fraudes massives ? Pire, les anciens mobutistes qui étaient humiliés par l'AFDL qui les a chassés du pouvoir sont allés comme des enfants quémander des postes politiques et partager le pouvoir avec le PPRD.

Non, il faut savoir garder sa dignité et respecter sa personne. J'affirme qu'il n'y a qu'un seul fléau en République Démocratique du Congo et il s'appelle l'« impunité ». Depuis l'époque coloniale, le peuple congolais n'a jamais cherché à punir ceux qui pillent et déstabilisent le pays. Nous n'avons rien réclamé aux colons belges qui ont pillé le Congo et les oeuvres d'art qui gisent toujours dans les musées belges. Vous connaissez Tervuren. C'est le Congo artistique qui a été transporté en Belgique. Nous n'avons jamais condamné le régime de Mobutu qui avait publiquement pendu quatre anciens ministres au Pont Kasa-Vubu. Les enfants de ces martyrs sont traumatisés à vie. Quelle a été la réaction du peuple congolais à la chute du régime de Mobutu ? Rien, personne n'a demandé des comptes. Le président Laurent-Désiré Kabila a proclamé une « révolution pardon  », c'est-à -dire la poursuite de l'anarchie. Aujourd'hui, personne ne demande de compte au pouvoir. Bienau contraire, les « intellectuels » courent derrière le pouvoir pour solliciter des postes et une fois au pouvoir ils se comportent exactement comme les mobutistes qu'ils critiquaient encore dans l'opposition ou depuis l'étranger. C'est regrettable.

En 2006, l'ensemble des Congolais a été trompé et manipulé. L' élection était plus qu'une comédie. Le mensonge et la manipulation ont fait croire au monde entier que c'est Joseph Kabila Kabange qui a gagné. Dans mon livre, j'apporte les preuves des fraudes en rassemblant des témoignages. Autrement, qu'on procède au recensement de la population pour pouvoir comparer les chiffres avancés par les ordinateurs de M. Malu Malu et la réalité ou, dans le cas contraire, qu'on crée une commission d'enquête composée de différents partis politiques, des membres de la société civile, des Églises. Je démontre également que la communauté internationale a participé et contribué au montage du mensonge contre les intérêts du peuple congolais. La République Démocratique du Congo est ainsi devenue un laboratoire des Nations Unies. C'est au Congo que l'on teste les recettes onusiennes avant de les appliquer ailleurs, parce que le peuple congolais est jugé naïf et peu exigeant. Il nous revient de remettre les pendules à l'heure, car à force de nous taire, de nous soumettre et de ne jamais manifester publiquement notre indignation et notre ras-le-bol devant les acteurs et les pays qui organisent astucieusement le retour de la colonisation en Afrique, nos pays succomberont les uns après les autres. La plupart des Congolais ignorent le travail occulte mené par des réseaux étrangers qui ne souhaitent pas l'indépendance réelle des pays africains et la libération totale de l'homme noir, car si les Africains se libèrent, qui l'Occident va-t-il encore soumettre, exploiter et dominer ? J'ai mené une analyse froide et impitoyable sur les fraudes électorales dans le but de rétablir la vérité.

Les Congolais doivent maintenant s'employer à accéder à la vérité sans plus chercher à être assistés par les États et les firmes transnationales qui exploitent le Congo. Lorsque les pays étrangers découvriront que les Congolais sont maintenant unis et ont acquis la maturité politique et la conscience nationale, qu'ils sont devenus responsables, ils s'ingéreront difficilement dans la vie politique de notre pays. Mais cela demande un sérieux engagement de la part de chacun de nous. Nous faisons encore trop confiance aux étrangers qui, pour cette raison justement, nous considèrent encore comme des grands enfants. C'est très indigne de notre part ! Comme une maison ne peut tenir sans une bonne fondation, une nation ne peut pas construire un avenir radieux en tolérant les fraudes. Dans une telle situation les fraudeurs ou encore les usurpateurs croient qu'ils ont acquis le droit de mentir. J'en veux aux hommes de droit. Certes, sous le mobutiste, la corruption n'épargnait personne, même pas ceux qui étudiaient le droit. Élevés dans la corruption, les magistrats ferment les yeux aujourd'hui devant des pratiques éhontées et rétrogrades. C'est regrettable. C'est lorsque le Congo aura des hommes de droit intègres, qui pratiquent et respectent le droit et la justice que l'impunité disparaîtra et le pays se mettra debout.

Quelle similitude faites-vous entre les élections qui viennent de se dérouler au Kenya et celles de la République Démocratique du Congo en 2006 ?

La différence est totale. Le Kenya est à sa deuxième expérience. Les Kenyans ont mis fin au régime tyrannique de Arap Moi en organisant ce qu'ils ont appelé la -bas « des élections propres ». C'est donc un peuple aguerri et persévérant qui refuse de se laisser tromper. En République Démocratique du Congo, depuis l'indépendance, les hommes forts qui s'emparent du pouvoir méprisent le peuple qui se laisse soumettre. Au Kenya, c'est encore le président de la commission électorale qui, en se fondant sur l'éthique et la déontologie, a émis un doute sur le succès électoral du président Kibaki, actuel chef de l'Etat. C'est qui a donné de la force au parti de l'opposition et à la population qui sont descendus dans la rue pour protester. Cela diffère de la complaisance dans laquelle se trouvent nombre d'hommes politiques de notre pays qui n'ont, pour la plupart, qu'un seul souci : accéder au pouvoir et jouir de ce pouvoir. Quelle que soit l'issue, le Kenya est sur la voie démocratique.

Les députés de l'opposition sont majoritaires au parlement alors que chez nous les ténors de l'opposition d'hier ont rapidement et clandestinement rejoint l'Alliance de la Majorité présidentielle (AMP -copiée sur le modèle de UMP en France). Nous ne sommes pas sérieux comparativement aux Ukrainiens, aux Kenyans ou encore aux Géorgiens. Les pays occidentaux qui connaissent parfaitement bien le comportement et la naïveté des Congolais se permettent tout dans notre pays au point de choisir eux-mêmes librement, et avant les élections, le chef de l'Etat qui leur plaisaient parce qu'ils ont estimé qu'il est plus facile d'obtenir des avantages économiques avec Joseph Kabange. Les élections étaient une comédie, une mise en scène pour faire croire et surtout pour prêter forcément de l'argent à la République Démocratique du Congo afin de contrôler ensuite plus facilement l'économie de ce pays. Nous ne jouissons pas de notre souveraineté parce que nous sommes collectivement naïfs, peureux et complaisants.

Les observateurs étrangers sont-ils "la garantie" pour le déroulement de bonnes élections dans un pays ?

Non et non. Beaucoup de pays l'ont déjà compris à telle enseigne qu'ils refusent la présence de ces observateurs. L'Algérie a refusé la présence des observateurs français. Que dire ? Les étrangers sont-ils plus sérieux et plus honnêtes que les Congolais ? Sont-ils plus nationalistes que les nationaux ? Non. Être observateur est un métier et celui qui est envoyé en Afrique pour observer les élections reçoit des instructions de son employeur. Il observe ce qu'on lui a demandé d'observer. Il n'est pas animé par l'éthique ou par la morale. Et ceux qui envoient les observateurs ne le font pas pour les beaux yeux des Congolais, si j'ose m'exprimer ainsi. Ils ont des intérêts et ils n'agissent pas pour jeter leur argent par-dessus la fenêtre. Un journaliste comme Stephen Smith, qui travaille normalement pour la défense des intérêts occidentaux en critiquant sévèrement les Africains afin d'affaiblir l'Afrique, a néanmoins eu le courage de reconnaître, dans son livre " Négrologie. Pourquoi l'Afrique meurt "que « l'Organisation internationale de la francophonie est une machine huilée pour sanctifier des scrutins scandaleusement truquée comme, par exemple, la réélection d'Idriss Deby au premier tour, avec 63 % des voix en juin 2001 ». Lorsque les pays occidentaux qui vivent sur le dos de l'Afrique ont leur candidat à« vendre », leurs observateurs « internationaux » répètent partout la même déclaration comme des perroquets : « Malgré quelques manquements organisationnels, les résultats traduisent la libre expression de la volonté populaire ». Stephen Smith précise : « Ces scrutateurs exceptionnels ne sont pas nécessairement fiables, au regard de leur indépendance de jugement. Ils tiennent en effet à rester inscrits sur les listes de la société civile privée à qui la Commission européenne sous-traite un travail lucratif, deux ou trois " missions " par an faisant vivre " plutôt bien " l'observateur électoral, une profession née de la démocratisation de l'Afrique ».

Beaucoup d'observateurs sont des gens avides d'argent. Ils ne vont pas pour observer nécessairement s'il y a des fraudes mais plutôt si les gens vont effectivement voter. C'est là toute la différence. Ne faudrait-il pas s'appuyer plus sur des observateurs qui examinent l'existence des fraudes que ceux qui se limitent à observer l'opération du vote ? Il n'y a qu'en Afrique que l'Occident envoie des observateurs en masse et la présence des observateurs est devenue un moyen officieux de poursuivre la colonisation, en surveillant et en contrôlant l'Afrique de l'intérieur. C'est une forme de mépris de l'Africain, car ce sont les mêmes pays occidentaux qui soutiennent les dictateurs qui nous envoient des observateurs. Cela ne doit-il pas faire réfléchir ? La véritable garantie, c'est notre propre sérieux. Nous devons apprendre à rédiger nos propres institutions au lieu de demander aux professeurs belges de rédiger notre Constitution comme si le Congo n'avait pas de Constitutionnalistes compétents. Nous devons revendiquer la transparence. L'abbé Malu Malu a repris textuellement la stratégie qui a été appliquée au Tchad. Comme au Tchad donc, il a organisé une fraude grossière en amont en procédant par un recensement des électeurs en lieu et place d'un recensement de la population. Puis, comme au Tchad également, il a amaigri l'électorat de l'Ouest et du Centre tout en boursouflant le corps électoral de l'Est prétendument acquis au chef de l'Etat. Malheureusement pour lui, les données statistiques montrent qu'après plus de cinq millions de morts inutiles et des milliers de déplacés dans les pays voisins, l'argument d'une majorité des masses à l'Est de la République Démocratique du Congo ne convainc personne. Donc, des fraudes d'une grande ampleur ont bel et bien eu lieu et les résultats de la CEI ne correspondent pas à la vérité comme le cardinal Fréderic Etsou l'a publiquement affirmé. Il est de notoriété publique que l'abbé Malu Malu travaillait pour le maintien de M. Joseph Kanambe Kabange au pouvoir et il est également de notoriété publique que la Cour Suprême de Justice mise en place par l'actuel chef de l'Etat travaillait pour la défense des intérêts du chef de l'Etat.

Qu'avons-nous fait collectivement pour nous opposer au scénario des fraudes électorales ? Rien. Puis, nous demandons aux Belges, aux Américains et aux Britanniques de nous « aider » en oubliant qu'ils ont leurs propres intérêts qui ne coïncident pas avec ceux du peuple congolais. On n'a jamais vu dans l'histoire un pays étranger développer un autre pays au détriment de son proprement développement. Les Congolais doivent revoir leur manière de juger et d'apprécier la politique étrangère des puissances qui exploitent les richesses du Congo. L'abbé Malu Malu ne s'est probablement pas rendu compte du tort qu'il a causé à l'Eglise catholique en ne pensant qu'à sa poche. A cause de lui, l'Eglise catholique a été humiliée à telle enseigne que le cardinal Frederic Etsou s'est senti obligé d'exprimer publiquement son indignation en déclarant : « Je dis fermement non et non à toute autre manoeuvre qui mettrait en cause le libre choix du peuple congolais, et qui risquerait de jeter le pays dans une confusion inutile. La Communauté internationale devait s'abstenir de toute tentative d'imposer au peuple congolais celui qu'il ne s'est pas choisi comme son président. Toute tentative de ce genre serait un acte grave d'irresponsabilité et pourrait hypothéquer et entamer tout ce qui fait la fierté et le prestige de l'Occident et des USA. Non donc aux manipulations frauduleuses des urnes. Non à ce qui n'est pas la volonté du peuple congolais. Non à toute tentative d'imposer au peuple congolais un candidat devant juste satisfaire les appétits gloutons et prédateurs de ses commanditaires étrangers des ressources du sol et sous-sol congolais. Aux responsables de la CEI, particulièrement M. l'abbé Apollinaire Malu Malu, nous vous invitons à déclarer et à annoncer les résultats vrais et crédibles qui reflètent le vote vrai des Congolais, gage pour une vraie paix et le début d'une ère nouvelle de reconstruction de la République démocratique du Congo, du respect de sa souveraineté et de l'unité nationale. Nous voulons par les urnes la paix. Nous voulons la paix ». Peu avant sa mort, le cardinal Fréderic Etsou a pris quelques dispositions en adressant une lettre très accusatrice aux Evêques de la CENCO. Cette lettre, qui a été reproduite dans le Journal Le Phare en date du 20 décembre 2006, dit : « A mon frère, Son Excellence Mgr Melchisedeck Sikuli, à qui je porte l'estime et du respect et qui connait mon engagement personnel pour la libération de notre frère Mgr Emmanuel Kataliko, d'illustre mémoire, à qui il a succèdé à Beni-Butembo, je dis ma désolation sur les propos que l'Abbé Malu Malu a tenus à mon endroit sur le plateau de la Radio-Télévision nationale congolaise (RTNC). J'en profite pour demander à l'Assemblée Plénière de la CENCO d'envisager à partir de l'an 2007 et dans le futur de ne plus concéder à aucun prêtre congolais l'autorisation de travailler dans les structures politiques au niveau national ou provincial. Il serait mieux de confier cette responsabilité directement à la CENCO et si cela est nécessaire de désigner, à l'unanimité, des Evêques qui peuvent en faire partie et qui seront redevables d'abord à l'Assemblée Plénière, ensuite aux organes de l'Etat qui nous sollicitent. »

Quelles sont les véritables failles de notre système électoral ?

Elles sont nombreuses en commençant par l'absence d'experts dans la CEI et dans les autres institutions, le recours au clientélisme, l'absence d'un personnel compétent et bien formé qui maîtrise le système électoral. Il n'existe pas une juridiction indépendante chargée du contentieux électoral. La magistrature est juge et partie. Elle n'applique pas la transparence et travaille et défend les intérêts d'une coterie. La population se retrouve ainsi sans véritable défenseur. Pareille pour la Haute Autorité des Médias (HAM). Cette institution publique n'est pas indépendante. En tout cas, pour sortir de l'impasse dans laquelle se trouve la République, il nous faut une juridiction indépendante. Les journalistes qui sont continuellement terrorisés et parfois assassinés ont peur de crier haut et fort. On se souvient du sort malheureux réservé à Franck Ngyke Kangundu et à Muamba Bapuwa pour ne citer que ces deux. Dans mon livre, je propose la création d'un Observatoire national de la bonne gouvernance qui s'occupera d'organiser des élections transparentes au suffrage universel. Il s'occupera également de l'éducation de la masse à la démocratie. Cela s'entend. Il faut des femmes et des hommes intègres dans cet Observatoire. Il est regrettable de constater que les modes de désignation (ou système électoral) ne sont pas bien connus dans notre pays, même par ceux qui ont un bagage universitaire. Beaucoup ne comprennent pas le vocabulaire relatif au système électoral comme le scrutin uninominal, le scrutin de liste, le système mixte, le ballottage, etc... alors que les mots sont bien français. Les véritables failles de notre système électoral sont donc à chercher dans le manque de transparence, dans l'ignorance du système électoral et dans le recours régulier au clientélisme et au néopartimonialisme.

Quelle est la part de la diaspora dans les élections au Congo,aujourd'hui et demain ? Que pensez-vous du ministère de la diaspora ?

La diaspora a été exclue du processus et elle a baissé les bras. C'est bien dommage. Elle l'aurait du » s'impliquer davantage. En tout cas beaucoup de pays misent sur leur diaspora pour élargir l'électorat national. C'est le cas des pays comme l'Espagne, le Portugal, les Philippines, etc. L'expérience fort négative et désastreuse pour la diaspora congolaise doit servir de leçon pour l'avenir. C'est l'Etat congolais qui donne des passeports à ses ressortissants, comment peut-il ensuite émettre des doutes sur la nationalité de ses ressortissants au seul motif qu'ils sont à l'étranger ! Le même Etat continue de vendre les passeports aux Congolais de l'étranger après avoir refusé leur participation dans le processus électoral, il est heureux de recevoir les véhicules et les transferts de fonds des Congolais de l'étranger. Et lorsqu'il s'agit d'une étape sérieuse comme le processus électoral, l'Etat ne reconnaît plus les siens. Ce n'est pas sérieux. C'est malheureux et honteux. Les Congolais de l'étranger ont compris leur degré de marginalisation, qu'ils tendent à devenir plus exigeants. C'est un signe avant coureur. Il me semble que l'Etat congolais confond la notion de Congolais de l'étranger dans lesquels il ne considère que les Congolais vivant en Occident. Or, en les excluant, l'Etat a aussi exclu les Congolais vivant au Congo-Brazzaville, en Angola, au Gabon et ailleurs parce que ceux-là font aussi partie des Congolais de l'étranger. Et dire que ce sont des intellectuels qui ont pris et prononcé la décision d'exclure les Congolais de l'étranger pour plaire à leur chef. A l'avenir les Congolais de l'étranger doivent s'organiser pour mieux défendre leurs droits. Il existe une plate-forme qui doit être renforcée. Elle s'appelle Fédération des Congolais de l'étranger en sigle FCE. En Afrique, à part l'Afrique du Sud, il est rare de trouver un pays qui associe ses ressortissants hautement qualifiés dans le développement du pays. Il y a certes quelques tentatives au Sénégal et au Mali. Chacun de ces deux pays a créé un ministère pour ses expatriés. Dans le cas de l'Afrique du Sud, le gouvernement considère sa diaspora comme un axe de sa politique de développement et comme un vecteur de transfert vers les secteurs du pays qui ont besoin de personnes très qualifiées. Le réseau SANSAS -South African Network of Skills Abroad- est l'un des dispositifs mis en place pour réaliser ce transfert. Ce réseau est devenu un modèle d'appui aux diaspora scientifiques et techniques sud-africaines à travers le monde. En matière de récupération de la matière grise expatriée, les meilleurs exemples ne sont pas en Afrique mais en Asie : en Inde, en Chine et à Singapour. Je suis tellement choqué et chagriné de voir le mauvais traitement que la République Démocratique du Congo réserve à ses expatriés que j'ai écrit un livre qui sortira cette année et dans lequel je livre des recettes sur le traitement adéquat à réserver aux immigrés et la nécessité de leur insertion dans l'économie du pays. J'espère que notre vice-ministre s'occupant de la diaspora congolaise y trouvera quelques leçons utiles. Je n'ai aucune prétention, mais notre pays doit commencer à nommer des gens compétents qui maîtrisent leurs dossiers au lieu d'avoir des hommes et des femmes qui apprennent leur métier en étant déjà en fonction. C'est bien dommage !

Existe-t-il une élite ou des élites congolaise(s) ? On dit que l'élite congolaise va souvent à la soupe qu'est-ce que cela signifie ?

A la question « Qu'est-ce qu'une élite ? », Pareto répondit : « Supposons qu'en toutes les branches de l'activité humaine, on attribue à chaque individu un indice qui indique ses capacités, à peu près de la manière dont on donne des points aux examens, dans les différentes matières qu'enseignent les écoles. Par exemple, à celui qui excelle dans sa profession, nous donnerons 10. A celui qui ne réussit pas à avoir un seul client nous donnerons 1, de façon à pouvoir donner 0 à celui qui est vraiment crétin. A celui qui a su gagner des millions, nous donnerons 10. A celui qui gagne des milliers de francs nous donnerons 6. A celui qui arrive tout juste à ne pas mourir de faim nous donnerons 1. A celui qui est hospitalisé dans un asile d'indigents, nous donnerons 0... et ainsi de suite, pour toutes les branches de l'activité humaine... Formons donc une classe de ceux qui ont les indices les plus élevés dans la branche où ils déploient leur activité, et donnons à cette classe le nom d'élite ». Pour répondre directement à votre question, il existe dans chaque pays plusieurs élites : intellectuelle, ouvrier, politique, traditionnelle, etc. Toutes ces élites remplissent des fonctions spécifiques même si la tradition voudrait que l'on parle plus de l'élite politique et intellectuelle. Une élite responsable doit remplir la fonction de témoin de la vérité, du bien et de la justice devant sa société. Non pas une fonction de témoin passif, indifférent, mais de témoin actif. Par son témoignage, l'élite devient un artisan de son temps car elle apporte plus de vérité, de bien et de justice. C'est pourquoi les vrais intellectuels ne sont manoeuvrables par aucun pouvoir, ni politique, ni d'aucune espèce. Ils suivent la voie de leur conscience quels qu'en soient les risques. Il y a dans notre pays des hommes cultivés et instruits à l'école occidentale (il existe aussi une élite traditionnelle qui est hélas négligée !) qui s'emparent du qualificatif « élite » ou « intellectuel ». Quant à l'existence d'une élite politique qui se réfère constamment à l'éthique de responsabilité, il m'est difficile de répondre positivement à votre question. L'élite intellectuelle congolaise a perdu sa dignité et sa fierté. Elle utilise son statut comme moyen d'accéder à de hautes fonctions et rarement comme une responsabilité vis-à -vis de la société. Cela doit être réparé si elle voudrait remplir valablement sa mission.

Après les élections la guerre a repris à l'Est, doit-on donner raison à ceux qui déclarent " après les élections est égal à l'avant les élections en RDC ?

On se souviendra de cette phrase de Janssen, « l'avant l'indépendance = après l'indépendance ». Dans l'entendement de ceux qui exploitent nos économies et qui nous exploitent maintenant indirectement, rien ne doit changer dans notre pays. N'oublions pas que sur le plan de la diversité des ressources naturelles, la RDC est probablement le pays le plus riche du monde. Les richesses de notre pays font saliver tous les princes et tous les rois de ce monde. Dans ces conditions, comment pouvaient-ils accepter que l'après les élections soit différent de l'avant ? Il nous manque de bons stratèges dans notre pays, de vrais leaders qui ne reculent pas, comme à l'instar de Gandhi et de Mandela, c'est-à -dire ceux qui ont déjà compris que pour changer le destin du Congo, il ne faut pas négocier avec des sous-traitants mais qu'il faudrait négocier avec les vrais responsables. Qu'ils s'appellent Kagame, Museveni ou Kabila, ce sont tous des sous-traitants qui travaillent pour les intérêts des grandes puissances. La RDC est un grand pays sur le plan géographique et il est promis à un grand avenir sur le plan politique grâce à l'effervescence de la jeunesse et à la richesse de son patrimoine. Nous devons aller à la rencontre les responsables des gouvernements étrangers qui gèrent à distance le destin du Congo, comme les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France ainsi que la Belgique. La conférence de Goma est un passe-temps, car les vrais acteurs y sont absents. Pourquoi vouloir traiter avec un « ange ? » là où il est possible de rencontrer Dieu. Kagame pille la richesse du Congo pour le compte de qui ? Est-ce que les Congolais ne peuvent pas renverser le courant ? Devenons des bons stratèges. Dans notre pays, le chef d'Etat arrive toujours au pouvoir par un coup d'Etat et par autoproclamation. Pour une fois que les Congolais ont souhaité une transparence dans l'organisation des élections afin de garantir l'avenir, des fraudes massives ont compromis cet avenir. A l'Est de la République, et ce n'est plus un secret pour personne, il y a eu des taux de participation supérieurs à 100 %. Il y a eu des bureaux et des électeurs fictifs. Du jamais vu dans un Etat qui respecte ses citoyens. Les Congolais ne sont peut-être pas conscients. Il y a un complot contre le Congo à cause de l'énormité des richesses que recèle notre pays. Le silence de la communauté internationale sur les 5 millions (alors que les casques bleus de l'ONU sont au Congo !) de morts est un indicateur de cette complicité. La mort des millions de Congolais n'ébranle personne, car on élimine par là des bouches en trop, des bouches « inutiles » qui ne réclameront plus une aide humanitaire d'urgence.

C'est vraiment honteux et pénible à admettre. Ne devons-nous pas nous interroger sur l'étrange comportement de l'ONU, des Etats-Unis, du Royaume Uni et de la Belgique dans la gestion du conflit congolais et dans l'organisation des fraudes ? Comment ces pays se sont-ils permis de cautionner une telle comédie électorale ? Alors cette question qui fâche. Sommes-nous collectivement conscients que notre pays est probablement le plus riche de la planète compte tenu de la diversité en ressources naturelles ? D'où était venu l'uranium avec lequel les Américains avaient fabriqué la bombe atomique larguée sur Hiroshima et Nagasaki et qui leur permit de mettre fin à la Seconde Guerre mondiale ? N'est-ce pas du Congo belge ? La RDC n'est pas un pays pauvre, elle est appauvrie. Voilà un Etat qui vend les minerais les plus stratégiques et les plus chers, réclamés par toutes les grandes puissances militaires et économiques du monde, mais qui est incapable de payer correctement et régulièrement les fonctionnaires. Même l'homme le plus bête ne peut pas comprendre cela. Alors quel est le problème ? Les Congolais qui sont assoiffés d'argent facile ne savent pas négocier, ils signent des contrats léonins sans connaitre la valeur réelle (minerais du sous-sol) de ce qu'ils vendent, ils signent les documents sans se donner la peine de lire le contenu mot à mot, sans associer une équipe de juristes et d'économistes chevronnés, car les autorité croient que c'est en cachant les contrats qu'elles signent avec les compagnies étrangères qu'elles s'enrichiront rapidement. Avec des villas achetées en Occident ou en Afrique du Sud par des compagnies minières étrangères et offertes aux décideurs politiques, ceux-ci sont prêts à vendre leur pays ! Les Congolais sont jugés si bêtes et si naïfs que toutes les compagnies minières étrangères retournent rapidement dans notre pays pour profiter de notre imbécilité, même celles qui ont quitté la RDC depuis des lustres. On ne peut pas posséder et vendre de l'uranium,dupétrole, du manganèse, de l'or, du cobalt, du coltan, du cuivre, etc. et être incapables d'avoir une armée nationale compétitive, et être incapables de défendre le territoire national, et être incapables de construire des routes de déserte agricole, etc. Comment pouvons-nous être si ridicules ! Pour quelle raison sommes-nous collectivement incapables de remettre en question tous les contrats miniers ?

Bref, les contrats léonins doivent être dénoncés en bloc afin de contraindre les compagnies extractives étrangères de les renégocier et afin qu'elles comprennent finalement que la RDC est un pays souverain qui a des droits à défendre et des exigences à faire valoir. Nous avons tendance à oublier que les ressources naturelles de notre pays appartiennent à tous les nationaux. Ce n'est pas la richesse du président ni des ministres. Chaque citoyen a son mot à dire. Donc si nous sommes pauvres et si les fraudes électorales ont été organisées, c'est avant tout notre faute, c'est parce que nous sommes collectivement parlant assez naïfs. Chaque individu ajuste son comportement avec l'espoir qu'il sera récupéré par le pouvoir afin de se servir, c'est-à -dire afin d'accéder à la mangeoire comme dit le professeur Augustin Mampuya. Alors les intellectuels font des éloges à des individus qui ne les méritent pas. On propose des idéologies rétrogrades qui ne peuvent pas développer le pays, car elles sont dépassées ou inadaptées aux réalités congolaises. L'élite intellectuelle et politique est à plaindre à plus d'un titre, parce qu'elle est devenue de plus en plus complaisante. Des universitaires qui ont souffert pour obtenir leur titre académique sont prêts à faire des courbettes à des décideurs qui n'ont pas leur niveau et qui ils doivent tout expliquer. Comme c'est ignoble ! On ne doit donc pas s'étonner et s'interroger sur : « Pourquoi après les élections est égal à l'avant les élections en RDC ? »

Quelles sont les conditions que la RDC doit remplir pour que les élections soient 100 % congolaises, libres, démocratiques et transparentes ?

Il faut d'abord « construire » des hommes nouveaux. Le mobutisme avec tous ses anti-valeurs a complètement détruit la jeunesse et c'est cette jeunesse élevée dans et par la corruption qui aujourd'hui accède au pouvoir. Que peut-elle offrir lorsque le pouvoir l'a habituée à donner et à recevoir la corruption sans état d'âme ? Ce n'est pas la faute de cette jeunesse devenue aujourd'hui responsable du destin national. Elle a été une victime. Tant qu'on ne montrera pas et qu'on n'offrira pas autre chose au peuple, il sera difficile de changer la mentalité des Congolais et d'organiser des élections « propres », c'est-à -dire transparentes et sans fraudes. Plusieurs ressortissants de Bundu dia Kongo ont été massacrés dans le Bas Congo parce qu'ils manifestaient simplement contre le recours à la corruption. Il faut ensuite mettre la lutte contre l'impunité au centre de la vie politique. En RDC, la politique est devenue le moyen le plus court pour s'enrichir. Depuis l'indépendance, on n'a jamais vu les hommes politiques qui détournent des millions être jugés. Le pouvoir incarcère ceux qui commettent de petits délits et les opposants et il laisse en liberté les assassins et les « grands voleurs ». C'est regrettable. Organiser des élections à 100 % congolaises, libres, démocratiques et transparentes sera un long chemin. Mais nous n'avons pas le droit de désespérer. En tout cas, si le peuple et les leaders de l'opposition ne font rien aujourd'hui pour dénoncer unanimement les fraudes qui ont eu lieu dans notre pays, nous devrons nous préparer aux prochaines fraudes, car rien n'empêchera celui qui vient de tricher et qui n'est pas sanctionné de refaire son numéro.

Il lui suffira de réaliser quelques projets économiques et de faire croire aux Congolais qu'il est l'homme qu'il faut pour développer le pays pour que les mêmes organisateurs (nationaux et étrangers) ferment à nouveau les yeux et facilitent sa reélection afin de continuer à piller ensemble le pays. Soyons collectivement vigilants, nous ne l'avons pas été jusqu'à présent. Nous devons devenir de bons stratèges, car nous sommes piégés. La guerre et l'anarchie sont voulues dans notre pays. Il est même permis de croire que les tricheries ont été planifiées et souhaitées pour plonger notre pays dans le chaos afin de montrer à la face du monde que les noirs sont incapables de se gouverner seuls ou tout simplement pour faciliter le pillage de nos richesses en achetant nos produits à vil prix, parce que le pays est à court d'argent. Vu de l'Occident, les fraudes électorales sont de l'ordre du normal dans les pays africains. Les décideurs congolais doivent apprendre à négocier avec les vrais responsables et plus jamais avec les sous-traitants. En ce qui me concerne, je suis prêt à faire partie de cette délégation qui cherchera à négocier avec les grandes puissances (exécutif et parlement américains, britanniques, français et belges) et avec les firmes transnationales qui maintiennent l'état d'anarchie et de guerre dans notre pays pour faciliter les pillages de nos minerais et leur achat à vil prix. Ce sont eux les vrais acteurs qui détiennent la clé de la paix au Congo. C'est la condition pour le retour de la paix. La conférence de Goma est une autre comédie. C'est en tout cas une perte de temps - une distraction - dans la mesure où il ne sortira rien de vraiment intéressant pour l'avenir de ces provinces (les deux Kivu et Maniema). Il nous faut de braves Congolais qui sont prêts à négocier la paix avec les « braves » grandes puissances économiques et militaires.

Que valent Kagame, Museveni, Kabila ou encore Nkundabatware Muhigo face au pouvoir américain, britannique, français et belge qui tiennent le pouvoir africain entre leurs mains ? Ces politiciens africains ne travaillent-ils pas pour eux ?

Les Congolais doivent se poser les vraies questions et aller à la rencontre des vrais acteurs. Aussi longtemps que la RDC ne traitera pas directement avec les grandes puissances et avec les firmes transnationales, il nous sera difficile d'arrêter la guerre et l'anarchie qui leur profitent bien. Pour changer le Congo, il faut que la magistrature pratique la justice et se mette à combattre les anti-valeurs, il faut que l'« intellectuel » change son comportement, il faut que le Congo en tant que nation, apprenne à devenir uni et autonome, qu'il fasse respecter sa souveraineté, il nous faut apprendre à fabriquer nous-mêmes notre richesse au lieu d'attendre les « dons » des Occidentaux ou encore la signature des « contrats léonins » avec les Chinois pour relancer les travaux d'intérêt public. Un bon dirigeant est celui qui développe son pays sans trop s'appuyer sur les apports financiers des pays étrangers comme cela se passe dans notre pays. Hélas !

Ses publications :

1- Les fraudes électorales. Comment on recolonise la RDC, Paris,décembre 2007, 227 pages. Edition l'Harmattan

2 - Le règne du mensonge politique en RD Congo. Qui a tué Laurent-DésiréKabila ?, Paris, 2006, 135 pages. Edition l'Harmattan

3 - Géopolitique, intégration régionale et mondialisation (essai),Paris, 2006, 319 pages. Edition l'Harmattan

4- Qu'est-ce que le pouvoir ?, (essai), Paris, 2004, 276 pages, Edition l'Harmattan

5 - Pouvoir et clientélisme au Congo-Zaïre-RDC (essai), Paris, 2001, 308 pages.Edition l'Harmattan 6- Qui gouverne le Zaïre ? La République des copains (essai), Paris, 1997, 337 pages. Préface de Jean-Claude Willame, Université catholique de Louvain, Belgique Edition l'Harmattan

7- Lettre à tous les Congolais. Savoir gouverner et servir la République, Saint-Légier (Suisse), Afrique Nouvelle, 2003.

8- L'exercice du pouvoir au Japon et en Afrique, Saint-Légier (Suisse), Afrique Nouvelle, 2001

9 - Le Paradis violé (roman), Saint-Légier (Suisse), Afrique Nouvelle, 1996

10- Quelle solution pour l'Afrique ? (théâtre), Saint-Légier(Suisse), Afrique Nouvelle, 1993

11- Maréchal Mobutu, je vous parle (pamphlet), Saint-Légier (Suisse),Afrique Nouvelle, 1990 (épuisé).

12- Couronne d'épines (poèmes), Paris, Saint-Germain-des-Près, 1985 (épuisé)

13- Cette chambre-là , May, Matadi (récit), CEZ, 1985 et Saint-Légier (Suisse), Afrique Nouvelle, 1990. Préface d'Eric Sellin, Temple University, Philadelphia, USA (épuisé)

Par Freddy Mulongo, mardi 22 janvier 2008 à 04 :05 : : radio : : #55 : : rss

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10/02/2008
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