Le Blog de Sacrebopol

ODEUR DE COMPLOT À L'AMP

Odeur de complot à l’AMP: pourquoi en veut-on à Vital Kamerhe ?

Qui en veut à Vital Kamerhe et qui veut le contraindre à démissionner de ses fonctions de président de l’assemblée nationale ? Les réponses fusent : le président de la république en personne, son entourage, le Parti du peuple pour la reconstruction et la démocratie (PPRD, parti présidentiel), l’Alliance de la majorité présidentielle (AMP).
Le torchon brûle tellement que l’on ne donne pas gros de Vital Kamerhe. L’homme n’est plus en odeur de sainteté dans sa propre famille politique ou mieux dans l’entourage du président Joseph Kabila où on le considère comme un « traitre ». Pour ces personnalités qualifiées d’extrémistes par certains, Vital Kamerhe a contribué à affaiblir le président de la République à la suite de ses déclarations sur Radio Okapi, exprimant son étonnement quant à l’entrée des troupes rwandaises en RDC pour y traquer les FDLR, rebelles hutu rwandais établis au Kivu depuis des dizaines d’années. Vital Kamerhe avait en effet indiqué à la radio cofinancée par la mission onusienne au Congo et la Fondation Hirondelle que l’assemblée nationale n’avait pas été tenue informée de l’accord conclu par le Rwanda et la RDC pour le déploiement des troupes rwandaises sur le sol congolais du Kivu.
Les déclarations de Vital Kamerhe avaient provoqué le courroux des dirigeants du PPRD qui avaient dû le convoquer. Depuis, c’est quasiment la rupture entre les caciques du PPRD – groupe conduit par Evariste Boshab, secrétaire général du parti dit présidentiel, et dans lequel on retrouve des députés Nkulu Mwenze, président du groupe parlementaire PPRD à l’assemblée nationale, et Me Mbuyu. Selon des indications, il s’est constitué autour du chef de l’Etat un état d’esprit qui ne permet plus la concorde entre Joseph Kabila et Vital Kamerhe. Le président de l’assemblée nationale, alors secrétaire général du PPRD, avait pourtant été au four et au moulin pour faire élire Joseph Kabila à la magistrature suprême. Pendant que nombre de ceux qui ne jurent que par son départ se la coulaient douce ou avaient le profil bas, ne pouvant pas vendre dans leurs « fiefs » l’image de Joseph Kabila, Vital Kamerhe sillonnait le pays pour faire la propagande de Joseph Kabila. Cela est particulièrement vrai pour le second tour de la présidentielle où l’on a vu Olive Lembe, l’épouse de Joseph Kabila, conduire seule avec le concours de Vital Kamerhe, la campagne de son mari.
Aujourd’hui, tout le travail de terrain de Vital Kamerhe est oublié. Sa prise de position initiale à l’entrée des troupes rwandaises en RDC pour y traquer les FDLR est considérée comme un « crime de lèse majesté ». Bien plus, on ressort les vieilles accusations qui voudraient présenter Vital Kamerhe comme un potentiel concurrent de Joseph Kabila à l’élection présidentielle de 2011. Les apparitions publiques de Vital Kamerhe à la télévision nationale lors des séances plénières de l’assemblée nationale sont considérées comme une propagande avant la lettre. La concrétisation du projet d’installation d’une télévision parlementaire ajoute à l’animosité, cette télévision étant considérée comme un instrument de propagande à la solde de Vital Kamerhe. Pourtant, il suffit de s’informer pour apprendre que l’assemblée nationale n’est pas la première chambre législative au monde à disposer de sa propre télévision. Même en France, il existe une télévision parlementaire.
Bref, Vital Kamerhe est un homme à abattre. Il est catalogué dangereux. Certains l’accusent même d’avoir instrumentalisé les députés qui ont initié une pétition en vue de la convocation d’une session extraordinaire de l’assemblée nationale devant notamment débattre des tenants et aboutissants de l’accord conclu par la RDC et le Rwanda matérialisée par l’opération de traque des rebelles hutu rwandais des FDLR au Kivu. Ces députés ont déjà recueilli 262 signatures, soit bien au-delà des 250 exigées, soit la moitié des membres de l’assemblée nationale pour obtenir du bureau de l’institution la convocation d’une session extraordinaire. Il est tout de même fort peu probable que le bureau accède à la demande des députés pétitionnaires pour des raisons politiques évidentes. Tout sera alors renvoyé à la prochaine session dont l’ouverture est prévue le 15 mars.

Cette session sera houleuse. On pourrait assister à une motion d’un député exigeant le départ du président de l’assemblée nationale et pourquoi pas de tout le bureau. Ce ne sont pas les raisons qui manqueront pour justifier une telle démarche. La machine sera ainsi enclenchée si Vital Kamerhe ne rend pas de lui-même le tablier. Or, à l’état actuel des connaissances, rien n’indique que Vital Kamerhe soit disposé à démissionner. L’homme pourrait choisir d’amener ses adversaires à aller jusqu’au bout de leur logique. Or, il est peu probable qu’un vote à bulletin secret aboutisse à la mise à l’écart de Vital Kamerhe. La menace d’une dissolution de l’assemblée nationale pourrait être brandie pour amener les députés à céder.
Il faudrait toutefois que les tenants de la dissolution trouvent une raison profonde pour parvenir à leurs fins. La constitution limite en effet le cadre d’une telle démarche. L’article 148, premier alinéa de la constitution précise : « En cas de crise persistante entre le gouvernement et l’assemblée nationale, le président de la République peut, après consultation du premier ministre et des présidents de l’assemblée nationale et du sénat, prononcer la dissolution de l’assemblée nationale ». La question que l’on pourrait se poser est celle de savoir s’il y a « crise persistante » entre l’exécutif et l’assemblée nationale. Peut-on considérer que les déclarations de Vital Kamerhe sur l’entrée des troupes rwandaises en RDC constituent une « crise persistante » ? Peut-on considérer la pétition des députés comme une « crise persistante » pour autant que la démarche n’a même pas abouti ? Autant de question qui indiquent que la marge de manœuvres des bonzes du pouvoir, pilotés par Augustin Katumba Mwanke, est étroite. Bien plus, il faudrait tenir compte du fait que la constitution ne prévoit nulle part la dissolution du sénat, qui est une des chambres du parlement. Par ailleurs, le même article 148 prévoit à son alinéa 3 une disposition contraignante. Il y est dit : « A la suite d’une dissolution de l’assemblée nationale, la commission électorale nationale indépendante convoque les électeurs en vue de l’élection, dans le délai de soixante jours suivant la date de publication de l’ordonnance de dissolution, d’une nouvelle assemblée nationale ». Si l’on sait que les finances du pays sont au plus mal et que rien n’est prévu dans le budget 2009 pour l’organisation d’une consultation électorale, on se demande bien si une dissolution de l’assemblée nationale est opportune. On se demande par ailleurs si Joseph Kabila prendra le risque d’apparaître aux yeux de la communauté internationale qui avait soutenu financièrement le processus électoral, comme celui qui piétine la démocratie en RDC. Il faut reconnaître que le parlement est, quoi qu’on dise, l’une des institutions du pays qui fonctionne plutôt bien.
Même le règlement intérieur de l’assemblée nationale ne donne pas plus de marge aux jusqu’auboutistes. A son article 26, il est dit : « Sans préjudice des autres dispositions du présent règlement intérieur, les fonctions d’un membre du bureau de l’assemblée nationale prennent fin par décès, démission, empêchement définitif, incompatibilité, départ délibéré de son parti politique, condamnation irrévocable à une peine de servitude pénale principale pour infraction intentionnelle ou déchéance prononcée par la plénière conformément à l’article 21 du présent règlement intérieur ». Or, Vital Kamerhe n’a pas démissionné de façon délibérée de son parti, le PPRD. Et quand bien même il serait chassé de ce parti, cela n’équivaut pas à une démission délibérée de sa part. Reste à savoir si le PPRD , qui pilote la coalition au pouvoir acceptera que soit maintenue à la présidence de l’assemblée nationale, une personnalité qu’il aurait chassée. Le PPRD ou la coalition au pouvoir pourrait toujours recourir à l’article 21 du même règlement intérieur en ses alinéas 3 et 4, qui stipulent : « Les membres du bureau sont élus pour la durée de la législature. Toutefois, en cas de faute grave ou d’incompétence constatée par la plénière dans l’exercice de ses fonctions, un membre du bureau peut être relevé de celle-ci suivant une procédure contradictoire. Dans ce cas, le remplaçant est élu pour le reste de la durée du mandat du membre déchu ». Déterminés, les membres de la coalition au pouvoir pourraient toujours trouver une « faute grave » dans le chef de Vital Kamerhe pour exiger sa déchéance.
A tout prendre, Vital Kamerhe est sur un siège éjectable. Les gestes qui concourent à le fragiliser et même à l’humilier ne se comptent plus. Il y a quelques mois, il avait dû abandonner précipitamment son bureau du palais du peuple pour le céder au chef de l’Etat qui devait s’y installer, pour, semble-t-il, y conduire des consultations avec des parlementaires. Jusqu’au jour d’aujourd’hui, Vital Kamerhe squatte un petit bureau dans le bâtiment construit par les Chinois alors que ses affaires et celles des membres de son cabinet sont éparpillées dans les couloirs. Indigne d’un président d ‘une institution. Vital Kamerhe a pourtant pris cela avec philosophie. Quoi qu’il en soit, l’homme n’est pas parfait, mais il mérite tout de même un peu plus de considération pour ses prestations passées et actuelles.
Franck Baku

http://bakufranck.wordpress.com/2009/02/11/qui-et-pourquoi-en-veut-on-a-vital-kamerhe/

11 février 2009 - Posté par bakufranck



12/03/2009
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