RDC : l'ONU évoque des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité
RDC : l'ONU évoque des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité
Mise à jour le mercredi 6 juillet 2011 à 18 h 55 HAE
Photo: AFP/Gwenn Dubourthoumieu En octobre dernier, 20 000 femmes ont manifesté à Bukavu, au Sud-Kivu, pour dénoncer le viol. |
Un rapport de l'ONU sur les viols massifs et les autres exactions commis par des rebelles au Nord-Kivu, en République démocratique du Congo (RDC), l'été dernier, évoque des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre.
Publié mercredi, le rapport final élaboré par le Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l'homme (BCNUDH) s'attarde à des exactions perpétrées entre le 30 juillet et le 2 août 2010 dans 13 villages du territoire de Walikale.
Selon les preuves recueillies, les combattants ont violé au moins 387 civils, soit 300 femmes, 23 hommes, 55 fillettes et 9 garçons. La plus jeune des victimes, dont le nombre serait cependant bien plus élevé, serait un bébé de 1 mois.
« La plupart des viols auraient été commis en présence d'enfants des victimes et d'autres membres de leurs familles et de leur communauté », peut-on lire dans le document, très descriptif, qui précise que les victimes ont subi des viols collectifs.
Les assaillants ont en outre « soumis à des travaux forcés plus d'une centaine de personnes » qu'ils ont enlevées et ont pillé près d'un millier de maisons et de commerces.
Par le fait que ces attaques ont été planifiées à l'avance et menées de manière systématique et ciblée, les exactions qui s'en sont suivies pourraient constituer des crimes contre l'humanité et des crimes de guerre.
— Extrait du rapport
L'ONU attribue ces violences à un groupe de 200 hommes, composé de rebelles hutus rwandais des Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), de milices des Maï-Maï et d'éléments du colonel congolais Emmanuel Nsengiyumva, qui a rejoint la rébellion, au début 2010.
Le rapport précise que les exactions semblent avoir eu pour but de « punir » les civils soupçonnés de soutenir le gouvernement.
La mission de l'ONU au Congo, qui vise à protéger les civils, a été vertement critiquée après ces attaques, qui se sont produites à seulement 20 kilomètres d'une de ses bases. L'ONU affirme que les Casques bleus ne sont pas intervenus parce qu'ils n'ont pas été informés de la situation.
Viols de masse, peu d'accusés
Les enquêteurs déplorent en outre les progrès « insuffisants » accomplis par la justice militaire, soulignant qu'une seule personne, soit le lieutenant-colonel Mayele, un chef des Maï-Maï, fait face à des accusations criminelles.
Ils regrettent également « l'absence de mesures adéquates » pour assurer la protection des témoins et des victimes, précisant que l'enquête judiciaire a dû être suspendue pour des raisons de sécurité.
Déplorant la « méchanceté ignoble » des actes commis, la haute-commissaire de l'ONU aux droits de l'homme, Navi Pillay, a réagi au rapport en réclamant la traduction des coupables présumés en justice et la fin de l'impunité. Elle demande aussi au gouvernement congolais de « protéger sa population » et à la communauté internationale de mieux équiper la mission onusienne au Congo afin qu'elle puisse remplir efficacement son mandat de protection.
Le ministre congolais de la Justice, Luzolo Bambi, a de son côté promis la tenue d'un procès.
Le recours à la violence sexuelle comme arme de guerre est un grave problème dans l'est de la RDC, où des groupes armés de plus en plus morcelés disputent aux Casques bleus et à l'armée congolaise le contrôle des terres et des ressources minières.
Selon un décompte de l'AFP obtenu auprès de sources médicales, quelque 248 femmes ont déclaré avoir été violées entre les 10 et 13 juin derniers par des soldats en fuite emmenés par un colonel à Abala, Kanguili et Nakiele, dans la province du Sud-Kivu. Le mois dernier, l'ONU avait parlé d'au moins 150 victimes dans la région de Minembwe, tandis que Médecins sans frontières recensait des dizaines d'autres victimes dans d'autres villages du Sud-Kivu.
L'ONU estime que 15 000 femmes ont été violées en 2009, dans les provinces de l'est de la RDC seulement.